Comprendre la douleur

19/10/2016

Personne n’aime avoir mal. Pourtant, la douleur, cette expérience à la fois sensorielle et émotionnelle, est vitale. C’est le système d’alarme que notre corps utilise pour nous alerter d’un danger potentiel. Mais lorsqu’elle persiste dans le temps, la douleur peut devenir pathologique.

Nul besoin de réfléchir pour retirer en un éclair une main imprudente d’une plaque de cuisson brûlante. C’est automatique ! Car sous la peau, les nocicepteurs veillent. Présents dans tout le corps ou presque, ces neurones de la douleur sont sensibles à la pression, à la chaleur ou au froid. « La nociception est le mécanisme intime utilisé par l’organisme pour ressentir les agressions extérieures », explique Frédéric Simonin, chercheur au laboratoire Biotechnologie et signalisation cellulaire. En cas de stimulus douloureux, les nocicepteurs émettent des signaux vers la moelle épinière qui peut alors déclencher un réflexe salvateur.

Ainsi, la douleur est d’abord inconsciente. « Ce n’est qu’une fois que la moelle épinière a transmis l’information au cerveau que l’on peut véritablement parler de douleur, souligne le biologiste. L’intégration du message dans le cerveau déclenche une composante affective qui fait défaut dans les systèmes relayant l’information. » La douleur est donc une émotion autant qu’une sensation. Désagréable, elle permet d’associer un stimulus douloureux à un danger. Et de s’en souvenir…

Quand la douleur se transforme en souffrance inutile

Lorsque l’on se coupe ou que l’on se brûle, la douleur ressentie est intense mais brève. Elle est dite aigüe. Par opposition, certaines douleurs sont dites persistantes ou chroniques lorsqu’elles perdurent pendant plusieurs mois voire plusieurs années. Ces dernières sont parfois difficiles à décrypter. « Certaines personnes continuent d’éprouver des douleurs alors que l’atteinte organique est réparée », indique Frédéric Simonin.

Pire, la persistance d’une douleur peut la renforcer et la généraliser. « Des douleurs inflammatoires ou neuropathiques (liées à une atteinte des nerfs) prolongées peuvent conduire à une neuro-inflammation du système nerveux central qui devient ainsi plus sensible à la douleur. Ce phénomène, appelé hyperalgésie, peut avoir des conséquences négatives sur le long terme, explique Frédéric Simonin. Il peut induire des états dépressifs ou anxieux. »  (Voir les rapports étroits entre douleur chronique et dépression)

Morphine et douleur, une relation ambiguë  

L’administration d’opiacés reste, à ce jour, le moyen le plus efficace de soulager des douleurs intenses. Mais, de façon paradoxale, leur utilisation prolongée entraine également une hyperalgésie, parmi d’autres effets secondaires (voir la vidéo ci-dessous). Depuis une quinzaine d’années, Frédéric Simonin cherche à comprendre les processus moléculaires et cellulaires à l’origine de cette hyperalgésie afin de pouvoir l’inhiber. Le chercheur et ses collaborateurs ont ainsi découvert, sur le rat et la souris, comment bloquer des récepteurs couplés aux protéines G (RCPG), pour réduire l'hyperalgésie induite en réaction aux opioïdes. Développé avec Conectus Alsace, le projet THIAPO-2, mené notamment par l'équipe de Frédéric Simonin en association avec un groupe de pharmaco-chimistes de la faculté de pharmacie de Strasbourg (Martine Schmitt, Frédéric Bihel et Jean-Jacques Bourguignon), permet d'élaborer de nouvelles molécules pour réduire les effets secondaires de l'administration d'opiacés. A terme, l’objectif est d’empêcher l’apparition de l’hyperalgésie tout en maintenant leur action analgésique. Un enjeu de santé publique.

Ronan Rousseau et Baptiste Cogitore

Les opiacés, "meilleurs ennemis" de la douleur

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