Les orages magnétiques, des dangers venus de l'espace

15/11/2017

Ils ont beau être imperceptibles pour nos organismes, mieux vaut ne pas sous-estimer le danger posé par les orages géomagnétiques, conséquences des sautes d’humeur du Soleil. A Strasbourg, des chercheurs assurent la continuité et la diffusion de données magnétiques, un travail indispensable pour espérer prévoir ces phénomènes.

Gare aux orages magnétiques ! Ils peuvent impacter une multitude de systèmes ou d’infrastructures. « En fait, tout ce qui contient du métal et qui peut être sujet à une grosse circulation de courant électrique induit », explique Aude Chambodut, chercheuse spécialiste du géomagnétisme à l’Ecole et observatoire des sciences de la Terre et l’Institut de physique du globe de Strasbourg. Ces orages, dont les aurores polaires sont les témoins fantomatiques, peuvent brouiller les communications radio, entraîner des pertes de connexion avec les satellites, "griller" les cartes électroniques, induire de fortes sur-intensités dans les lignes électriques, accélérer la corrosion des pipelines, etc. Les dommages sont loin d’être restreints à de simples interférences. « Déjà en mars 1989, un puissant orage magnétique avait plongé le Québec dans le noir pendant 9 longues heures avant que le réseau ne puisse être rétabli, rappelle Aude Chambodut. Aujourd’hui, il y a tout à craindre que les répercussions d’un tel orage soient plus sévères encore pour des sociétés devenues très techno-dépendantes. »

Meilleur ennemi

Le coupable de ces perturbations magnétiques est visible quotidiennement dans le ciel : le Soleil. Il projette en permanence un flux de particules chargés vers la Terre. Ce vent solaire se heurte à la magnétosphère qui le dévie et protège ainsi les êtres vivants de rayons cosmiques nocifs. Ce bouclier protecteur se trouve néanmoins particulièrement malmené en cas d’éruptions solaires dirigées vers la Terre. Lors de ces brusques et colossales émissions de plasma, une déferlante de particules de haute énergie s’abat sur la magnétosphère. Chargés électriquement, ces particules interfèrent avec le champ magnétique terrestre et entraînent de brutales impulsions électromagnétiques susceptibles d’occasionner des dégâts.

« On ne se rend pas compte à quel point nous sommes chanceux parfois. Certains de mes collègues soupirent de soulagement quand une grosse émission de masse coronale manque la Terre, confie la chercheuse. C’est un risque face auquel il est difficile de lutter. Mis à part concevoir des systèmes qui soient les plus robustes possibles, il n’y a pas beaucoup de solutions. » D’autant plus que l’émission de plasma par le Soleil ne suit pas une trajectoire rectiligne, ce qui rend les impacts difficiles à prévoir.

Observer pour prévoir

Dans ce contexte, à l’aide d’environ 200 observatoires répartis à la surface du globe, la communauté scientifique s’efforce d’acquérir le plus de données possibles pour démêler le jeu de causes et de conséquences à l’origine des variations du champ magnétique terrestre. A l’EOST, Aude Chambodut a la responsabilité d’assurer la continuité des mesures de six observatoires magnétiques répartis en Antarctique, dans des îles subantarctiques et à Madagascar. La chercheuse et son équipe gèrent également le Service international des indices géomagnétiques (ISGI). « A partir de données magnétiques internationales issues d’observatoires au sol, nous avons à charge de calculer et/ou de diffuser un certain nombre d’indices géomagnétiques officiels. » Des données largement utilisées par la communauté scientifique, mais pas seulement. Elles intéressent également le monde industriel tel que les avionneurs et le secteur militaire. « C’est une science relativement récente. Un travail de longue haleine nous attend avant d’espérer produire des prévisions précises en météorologie de l’espace. »

Ronan Rousseau

Le calme avant la tempête ?

Good to know

La fréquence des orages géomagnétiques est liée au cycle solaire de 11 ans. « Il y a 1 à 9 orages extrêmes par cycle, indique la chercheuse. Selon les statistiques, un orage suffisamment intense pour impacter la Terre et les infrastructures humaines pourraient survenir tous les 60 ans, mais ce chiffre reste très hypothétique. »

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