Covid-19, à qui profite le crime ?

23/09/2020

[Série] Regards croisés de chercheurs sur la Covid-19 : criminologie. Loin de dissuader les criminels, la crise sanitaire crée de nouvelles opportunités pour le crime organisé qui adapte ses modes opératoires. Le point avec Chantal Cutajar, directrice générale du Collège européen des investigations financières et de l'analyse financière criminelle (Ceifac). La chercheuse animera une conférence sur le sujet le 14 octobre prochain.

Lors de l’opération Pangée menée par Interpol du 3 au 10 mars 2020 dans plus de 90 pays, 121 personnes sont arrêtées avec une saisie de 14 millions de masques, de produits pharmaceutiques et de gels hydroalcooliques contrefaits. « Les collectivités elle-même ont parfois été victimes d’escroqueries avec l’achat de masques de contrefaçon », souligne la chercheuse qui précise qu’après une phase d’adaptation, les criminels se sont rapidement réorganisés pour tirer profit de la situation dans différents domaines.

La crise a rendu le système financier perméable à l’infiltration des organisations criminelles. « Elles profitent des entreprises en difficulté pour leur proposer de l’argent sale et ainsi le blanchir. Les organisations criminelles s’arrangent également pour s’approprier les aides économiques destinées à la gestion de la crise. »

Ubérisation du trafic et circuits courts

Côté stupéfiants, dès le 16 mars, la fermeture des frontières et l’augmentation des contrôles entrainent une rupture des approvisionnements avec une chute du trafic estimée à 30%. Cette phase de pénurie s’accompagne d’un accroissement de la violence d’environ 20% dans une logique de conquête de territoires. « Il y a eu une explosion des tentatives d’homicides volontaires notamment à Strasbourg ainsi qu’une augmentation du prix des stupéfiants de 40 à 50% », note la chercheuse qui précise que des stocks avaient été constitués pour répondre à la demande avant le début du confinement. La reprise du trafic reprend dès que les camions pour l’approvisionnement alimentaire sont à nouveau autorisés à circuler. 

Réseaux sociaux pour l’organisation des commandes, livraisons à domicile, système de drive… le marché se restructure et les trafiquants mettent en place des stratégies de contournement pour gérer les demandes. « On assiste à un phénomène d’ubérisation. Les circuits courts et la culture indoor se développent. Le crime organisé a fait preuve d’une grande capacité d’adaptation. Les habitudes ont changé. Les moyens de lutte contre le crime organisé vont devoir s’adapter », conclut Chantal Cutajar.

Marion Riegert

Good to know

Pour apporter un éclairage sur cette situation inédite, le Ceifac organise la conférence « L’impact de la Covid-19 sur la criminalité organisée ». Elle réunira un représentant des principales institutions concernées à l’échelle internationale, européenne et nationale, Interpol, Europol et Tracfin, la cellule de renseignement financier française. Elle sera animée par Chantal Cutajar et Marc Simon, co-directeur du Ceifac.

Regards croisés de chercheurs sur la Covid-19

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Psychologie, éthique, économie, histoire, virologie… nous sommes partis à la rencontre de chercheurs de différents domaines de l’Université de Strasbourg pour apporter un éclairage sur la crise du coronavirus.

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